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Comment mettre fin aux conflits répétitifs en Guinée Forestière ?

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Le 22 mars 2020 dernier, pendant qu’une grande partie de la Guinée votait au double scrutin, la ville de N’zérékoré faisait face à des violences à relent communautaire entre les populations Guerzé et celles Konia. Le bilan est lourd, plus d’une trentaine de morts selon des sources proches des parents des victimes et plusieurs autres blessés. S’en sont suivi des arrestations dans la ville et les villages voisins.

Depuis lors la procédure judiciaire est en cours. Pendant ce temps, les autorités locales et certains fils ressortissants de la localité ont entrepris les démarches  pour « ramener la paix »  dans la région.  Déjà depuis 1991, la région de N’zérékoré est l’objet de conflits politiques qui opposent souvent  les populations d’ethnie Kpèlè, Loma, Kissi, Manö,  en majorité chrétiennes et considérées comme les premiers occupants contre les populations Konia, Malinké, d’origine mandingue et à majorité musulmane. Les violences surviennent  souvent en amont ou en aval  d’un processus électoral.

Le modus opérandi  est  toujours le même : les uns prennent les armes, les gourdins, les machettes et les autres en font autant ;  le désir de vengeance est de tous les cotés. Les victimes se comptent par dizaines, la justice presqu’absente, les familles des victimes abandonnées. Cette région est l’une des  plus abandonnées du pays : l’électricité est un luxe,  le chômage est très élevé, les routes ne sont pas encore au rendez-vous, les hôpitaux insuffisants et les malades font des kilomètres pour bénéficier des soins, l’administration fonctionne au minima, les moyens de communication (internet, téléphonie, radio,…) ont un service minimum. Les hommes politiques de tout bord n’hésitent pas à trouver qui est allogène ou autochtone, qui prie le bon Dieu et qui ne le fait pas. Ils trouvent toujours un moyen  d’opposer les fils et filles de la région.  Il a été aussi observé qu’il y a une volonté de certaines personnes de changer l’histoire de cette région. Il est aussi question de l’extrême pauvreté dans laquelle végète la population.

Au regard de toutes ces observations, il faut dire qu’il est temps d’organiser un dialogue  auquel toutes les parties concernées doivent prendre part.
Ainsi la question ne doit pas être de savoir qui a commencé, qui a tort ou qui a raison. Mais elle doit être celle de savoir comment mettre fin à ces conflits répétitifs   dans la région. Dans ce cas il n’est pas question d’agir à moitié  mais de mettre en place un véritable processus de réconciliation.  Nous n’avons pas besoin d’un événement  qui se mesure par la qualité de son organisation, mais d’un événement qui débouchera sur un véritable  processus de réconciliation entre les fils de cette région en vue de panser les plaies béantes que les différents conflits  ont laissées.

Si le conflit est la rupture d’un contrat ou d’un équilibre social, sa résolution suppose donc le retour à l’ordre social perdu ou la mise en place d’un  ordre social consensuel.
La réconciliation  découle de la résolution du conflit qui consiste à choisir une solution à un affrontement et à assurer sa mise en œuvre.  Aussi on ne peut pas résoudre un conflit en dehors  du conflit lui-même (sa nature, ses causes, les personnes qui le vivent, le contexte dans lequel il se passe, les acteurs périphériques.
Donc ces faits étant pris  en compte, les personnes concernées doivent être prêtes à accepter les négociations et le compromis trouvé.
Ensuite les personnes qui doivent conduire le processus de réconciliation. En effet, il est pratiquement incompréhensif de voir que le processus de la réconciliation en région Forestière soit géré par les administrateurs quand on sait que les pouvoirs publics ont toujours été accusés de laxisme, de parti pris. Les hauts cadres ressortissants de la Guinée forestière sont aussi complices de ces crimes ; ils sont aphones tant que leurs intérêts sont biens gérés ; ils servent toujours du côté du pouvoir, même si parfois les forces de l’ordre prennent part aux exactions contre les populations civiles.
Dans le présent cas, le pouvoir qui est l’initiateur doit poser certains préalables : il s’agit de libérer les gens qui sont en prison, d’ouvrir une véritable enquête autour des violences  du 22 mars 2020, mais aussi celles des  autres années précédentes, désarmer les chasseurs traditionnels et les  désengager de toutes les activités urbaines qu’ils effectuent, remettre le processus de dialogue aux religieux pour sa conduite.

Le dialogue, il ne doit pas être seulement être inclusif, il doit surtout être constructif. Il faut  une attention toute particulière à son impact et aux conditions à remplir pour que le dialogue aboutisse sur la réconciliation dans la région forestière.

Robert Kamano

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