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Lamine Guirassy : « on veut tout simplement nous faire taire »

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Depuis plusieurs semaines, les auditeurs de la radio Espace n’arrivent pas à bien capter la fréquence de la station 99.7 en bande  FM. Un constat alarmant qui crée de désagrément pour la radio la plus écoutée du pays.

Interrogé sur la situation par Verite224.com, Lamine Guirassy, Président directeur général du Groupe Hadafo Media parle d’un brouillage de la fréquence de sa radio. Le « bulldozer » s’exprime par la même sur d’autres sujets au cours de cet entretien exclusif. Lisez.

Verite224.com : vos auditeurs n’arrivent pas à bien écouter. Parlez-nous de cette situation ?

Lamine Guirassy : On est confronté à un problème depuis deux mois de cela. Nous sommes victimes de brouillage si je peux le dire ainsi. Après constat, on n’a pas voulu médiatiser, on a écrit à l’ARPT. Cela perdure depuis deux mois maintenant. L’ARPT nous a répondu qu’ils ont en train de mener les enquêtes mais ces enquêtes n’aboutissent pas. Pendant tout ce temps, nos auditeurs sont en train de se plaindre pour ce qui se passe. Il fallait trouver une solution. C’est dans ce sens qu’on s’est dit qu’il faudrait alerter l’opinion pour voir ce qu’il en est à ce problème. Après constat moi je dirai simplement qu’il s’agit d’un sabotage. L’argument qu’on nous sort, ce sont deux radios léonaises et aujourd’hui j’apprends qu’il y a une troisième radio qui a commencé à émettre au mois de novembre 2020 du côté de Freetown certainement qui à la base du brouillage de notre fréquence. On est confronté à ce problème, on espère dans les heures à venir voir dans les jours à venir qu’une solution sera trouvée par rapport à cette situation.

Vous l’avez dit tout à l’heure, le Directeur général adjoint de l’ARPT a donné une explication par rapport à ce brouillage. Visiblement vous n’êtes pas convaincu de cette explication sur la cause de ce brouillage.

Pas du tout, nous ne sommes pas convaincus. Parce qu’on ne peut pas coopérer avec un voleur. Conakry ce n’est pas Freetown, ce n’est pas la Sierra Leone, s’il y a de débordement évidemment c’est à l’ARPT de prendre des dispositions pour qu’on puisse arrêter tout de suite. Si vous vous souvenez, Sweet FM qui est la deuxième radio du Groupe Hadafo Media émettait sur 99.3, à un moment l’ARPT nous a demandé de changer de fréquence, nous avions dit qu’on ne peut pas comprendre que nous émettions depuis dix ans sur 99.3 et que vous ne demandez aujourd’hui de changer. On nous avait dit que la radio brouillerait une radio léonaise. Et vu que cette radio est plus ancienne que Sweet FM, on a suivi ce que l’ARPT nous avait dit. Ils nous ont donné la fréquence 99.1. Sur ça, il a fallu beaucoup de communications là-dessus. Heureusement qu’on n’avait pas seulement une radio, on avait aussi de télé, on a fait comprendre aux auditeurs que la radio changeait de fréquence. Ce qui fut fait. Aujourd’hui évidemment ç’a changé. Si on se réfère au courrier de Natcom qui est l’équivalent de l’ARPT en Sierre Leone, Espace est la plus ancienne en ce qui concerne cette fréquence. Nous avons été les premiers à avoir la fréquence depuis 2007. Espace, c’est 14 ans en Guinée. Officiellement nous avons démarré en janvier 2008 mais officieusement on a commencé en décembre 2007. Il y a quelque chose qui cloche. Quoi exactement ? Est-ce que les autorités léonaises ne veulent pas du tout abdiquer parce qu’une radio qui a commencé en novembre 2020, ça c’est l’année dernière. Normalement, on peut donner cette radio une autre fréquence. Je pense qu’il y a une volonté politique derrière tout ça et s’est fait à dessein. Depuis les vacances 2020, je pense que tous les Guinéens sont témoins ce que nous sommes en train de subir. Moi je ne suis pas quelqu’un qui se victimise. Je suis un bosseur ce n’est pas pour autant qu’on doit s’apitoyer à dire le gouvernement veut nous détruire, tout le monde sait ce qui est en train de se tramer maintenant c’est à nous de porter le courage et surtout de travailler comme avant c’est ce que nous sommes en train de faire. Est-ce que parce qu’on a tout essayé pour nous mettre à terre et qu’on n’arrive pas finalement et dire qu’on va passer maintenant par la méthode forte pour brouiller notre fréquence. Je pense ce sont des méthodes archaïques, c’est ce que je disais la dernière fois avec un de vos confrères en disant que l’Etat ne peut pas se comporter comme un voyou. Ce n’est pas possible.

Selon vous, le gouvernement chercherait à vous faire taire ?

Ce n’est pas un secret mon cher ami. Comment est-ce qu’on peut comprendre depuis août 2020 qu’on puisse demander aux ministres de la République comme si nous étions des radios clandestines qu’aucun ministre de la République ne doit parler chez nous du moins dans les Grandes gueules. Comment on peut demander à un parti politique que personne ne doit intervenir chez nous or, nous ne sommes pas un parti politique. Ça devient problématique tout ça si ce n’est pour peut-être dire vous les malpropres maintenant vous ne devez plus exister dans ce pays, au moins qu’on le sache et puis comme ça c’est clair pour tout le monde. Si on veut demain qu’Espace n’émette plus en Guinée qu’on nous dise, comme ça le compte est réglé. Ces sont des pratiques qui ne sont pas dignes d’un Etat, je pense que nous ne sommes pas des opposants, nous faisons normalement notre boulot s’il y a un problème qu’on nous le dise. Il y a la Haute autorité de la communication, qu’on nous sanctionne si on a tort mais tel n’est pas le cas. Nous n’avons jamais reçu un avis de la HAC pour nous incriminer.

Nous avons appris qu’il y a eu encore des établissements étatiques qui ont été interdits de faire de la communication et de la publicité chez vous ?

Ça englobe tout. Si on nous prend directement comme des opposants. Aujourd’hui, force est de croire que l’opposition est très malmenée dans le pays, est-ce qu’on nous met dans le même panneau, qu’on nous dise clairement. Nous ne sommes pas des politiques, nous faisons notre travail. Si l’Etat doit agir qu’il le fasse à visage découvert mais pas comme un voyou.

Beaucoup des gens s’attendaient à ce que vous soyez dans le déclin mais c’est le contraire qui s’est produit, vous avez maintenu votre position et certains disent même que votre audimat a explosé. Qu’est-ce que vous avez fait pour résister à ces attaques ?

C’est évidemment, continuer notre travail. Si ce n’est évidemment accentué une ouverture à l’international. Vous avez dû le remarquer, vous étiez là à la rentrée, vous m’aviez interviewé, je vous ai dit un tout peu qu’on est en train de voir comment Espace peut s’ouvrir dans le contexte international. C’est ce qu’on est en train de faire. Pour votre information, ça c’est un scoop pour vous, nous avons eu cette attribution d’une fréquence mais en dab à Dakar, cela veut dire c’est la TNT et nous ce qu’on demande c’est la haute fréquence raison pour laquelle au Sénégal on n’a pas pu mettre en place la radio. Nous espérons que les autorités sénégalaises attribueront cette fréquence à notre groupe du côté du Sénégal. Je pense que quand on est sur le feu de l’action et qu’on veut à tout prix coûte que coûte de vous mettre à terre le mieux pour vous c’est de faire ce que vous savez faire. C’est ce que nous essayons de faire à Hadafo Media. Ça peut déranger évidemment. Le but recherché par des gens qui sont tapis dans l’ombre qui ont bien ficelé ce coup pour essayer de nous mettre à terre on voit loin que ça ne marche pas. Ils ont la pression. La personne qui a commandité ce coup se demande qu’est-ce qui se passe pourquoi jusqu’à présent ils ne sont pas à terre. Evidemment la pression est là, il faut encore sortir d’autres méthodes archaïques pour nous faire taire. La dernière en date évidemment c’est le brouillage de notre fréquence mais je pense qu’ils vont se fatiguer.

Brouillage de fréquence, poursuite judiciaire abusive contre des journalistes, quel regard portez-vous sur la liberté de la presse en Guinée ?

Je pense que c’est un recule, nous méritons mieux. J’ai l’impression que parfois que ce n’est pas un civil qui est au pouvoir. Parce que si c’était des militaires on pouvait comprendre. Vous ne pouvez comprendre exactement les bases mêmes de la démocratie, c’est la liberté d’expression. Si dans un pays on dit qu’il ne doit pas y avoir des voix discordantes ça devient très compliqué à la fin du compte. Il ne faut pas mettre tout le monde au pas comme ils le disent, il y a des gens qui disent ce qu’ils pensent et je pense que c’est pour le bien de notre démocratie. Si on dit qu’il faut que tout le monde conjugue le même verbe je pense que c’est un mauvais signale qu’on est en train d’envoyer au monde entier et ce n’est pas bon pour notre démocratie. Voir que c’est au temps de Lansana Conté qu’on a libéralisé les ondes en Guinée et qu’on en vient à ce point aujourd’hui, c’est un civil qui est au pouvoir et voir qu’il y a cette régression, je trouve que c’est dommage.

Est-ce qu’on s’achemine vers des dérives dictatoriales ?

Non, je n’ai pas dit ça. Je ne suis pas un homme politique, je suis un journaliste, je constate les faits ce qui se passent en ce moment. Est-ce qu’au plus haut niveau on est au courant de ce qui est en train de se passer avec les journalistes, avec tout ce que comme dérive dans notre pays ? Je me pose de questions. On verra bien ce que va donner d’ici la fin de l’année.

Votre mot à l’endroit de nos milliers de lecteurs ?

C’est de continuer à suivre votre site. Je l’ai toujours dit parce que vous venez toujours à la base pour recueillir les informations. Ce n’est pas un site de buzz. Je vous félicite évidemment pour cet esprit d’être sur le terrain et surtout d’avoir des vraies infos et je pense que ça y va de la notoriété de votre site. Grand merci à tous vos lecteurs. Quoi qui arrive on est ensemble et nous allons continuer le combat.

Entretien réalisé par Alpha Oumar Diallo

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