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Le populisme sanitaire

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Insurrection invisible ? Dans une vie politique paralysée par la pandémie, avec un Parlement désert et une opposition soucieuse de ne pas accroître les divisions quand l’Etat mène un combat ardu et incertain contre le coronavirus, les protestations se réfugient sur les réseaux sociaux. A côté de contributions intelligentes, de critiques pertinentes, d’appels nombreux à la solidarité, toute une littérature agressive, insultante, complotiste à souhait, se répand à la vitesse d’un virus numérique. Une vidéo affirmant que le Covid-19 a été créé en laboratoire à des fins diaboliques recueille un million de vues, le hashtag #IlsSavaient fait un carton en accusant «les élites» d’avoir sciemment laissé l’épidémie se diffuser, le professeur Raoult, à son corps défendant, devient le héros massivement adulé d’une contre-information sommaire, des tweets vengeurs soutiennent que la classe politique se protège indûment à l’aide de scandaleux passe-droits, etc.

Un discours acerbe aux raisonnements fantasmatiques se cristallise en ligne, prolongeant dans le champ sanitaire la rhétorique fruste et démagogique qui infeste la vie politique. Elle oppose encore une fois le peuple souffrant à une mince couche de dirigeants irresponsables et cyniques, à la manière des philippiques grossières qu’on a connues au temps des gilets jaunes. Une nouvelle vague populiste suivra-t-elle la vague des contaminations qui inquiètent tant le corps médical ? On ne sait encore mais l’hypothèse n’a rien d’invraisemblable.

Au même moment, le paradoxe du populisme se manifeste de manière éclatante à l’échelle internationale : ce sont justement les leaders portés au pouvoir par la même colère populaire qui mènent les politiques les plus contestables. Aux Etats-Unis, Donald Trump a nié avec force, pendant un long mois, la gravité de la crise. Voyant que son pays devenait l’un des plus durement touchés par le virus, il a fait brutalement machine arrière, tout en affirmant que les mesures de confinement seraient rapidement levées et que l’économie américaine serait repartie à Pâques, quand ses propres conseillers prévoient une lutte bien plus longue. Il a proposé tout de go d’isoler totalement l’Etat de New York du reste du pays avant de changer d’avis quelques heures plus tard. Devant l’évidence des faits et l’inquiétude de l’opinion, avec un mois de retard qui coûtera de nombreuses vies, il s’est résolu à adopter les mesures de bon sens prises dans la plupart des pays, au vrai mal appliquées en raison du fédéralisme états-unien. Il tient des conférences quotidiennes tissées d’autosatisfaction bravache, se félicitant de leur audience télévisuelle tel un producteur de reality-show et s’auto-congratule en prévoyant qu’un bilan final limité à quelque «100 000 morts» (sic) démontrera l’excellence de ses décisions. Peu importe le caractère notoirement foutraque de ses interventions : ses sondages sont bons, ce qui le conforte une nouvelle fois dans sa manière erratique et péremptoire.

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