Cacophonie au sommet de l’Etat : bras de fer entre le premier ministre et son ministre des travaux publics
L’administration guinéenne renoue avec ses vieux démons de crise institutionnelle. L’acte qui illustre ce dysfonctionnement est la note de service du ce dimanche soir 6 novembre du premier ministre, Bernard Gomou. Par le truchement de cette note lue sur les antennes des médias d’Etat, le chef du gouvernement a annoncé la suspension de son ministre des infrastructures et des transports, Yaya Sow et plusieurs de ses collaborateurs dont le sulfureux Saa Yalondé Camara, directeur national de l’entretien routier.
Sauf que dans cet acte, le premier ministre ne précise pas les motifs de la prise de cette décision jugée « radicale » par certains hauts cadres qui ont échangé avec un journaliste de Verite224.com. De son côté, le ministre suspendu n’a pas tardé à exprimer son incompréhension.
Au cours d’un entretien qu’il a accordé à nos confrères de Guineenews, Yaya Sow donne tout de même un indice qui pourrait motiver sa suspension. Un audio impliquant deux cadres du ministère serait à l’origine de cette décision. Son numéro deux, le secrétaire général Patrice Toupou et le directeur national de l’entretien routier aurait tenu une réunion au cours de laquelle les deux responsables ont discuté sur le partage de certains marchés de construction des infrastructures routières.
« Maintenant, au lieu de suspendre Patrice Toupou et Saa Yolande Camara qui sont impliqués dans cette histoire, on crée l’amalgame en mettant tout le monde. Nous n’avons pas assisté à cette réunion, c’est l’un d’entre eux qui a enregistré, donc c’est entre eux« , explique M. Sow.
D’après lui, le premier ministre s’était personnellement impliqué pour rétablir dans ses fonctions Saa Yalondé quand il avait suspendu celui-ci. « Et Saa est revenu, après sa suspension, pour se venger. C’est donc un complot, en disant dans l’audio que le ministre a demandé ça, alors qu’il n’en est rien. C’est juste que Saa voulait se venger de moi, et le Premier ministre l’a accompagné dans ce projet« , martèle le ministre suspendu avant de conclure qu’il est « serein » et ne se reproche de rien. En attendant d’y voir clair, on apprend que le colonel Mamadi Doumbouya, chef de l’Etat de facto depuis le coup d’Etat du 5 septembre a été interpellé pour jouer à l’arbitrage entre les différentes parties.
Par le passé, la Guinée a connu plusieurs cacophonies qui ont ébranlé le sommet de l’Etat. La période la plus illustrative est le décret de nomination d’un nouveau gouvernement et le contre-décret qui avait suivi, limogeant Cellou Dalein Diallo de son poste de premier ministre de Lansana Conté.
Alpha Oumar Diallo