Toutes les infos en direct sur la Guinée

IBK déposé par l’armée : peut-on craindre de l’effet contagion en Guinée et en Côte d’Ivoire ?

0

Le coup d’État perpétré contre le désormais ex-président malien, Ibrahim Boubacar Kéita provoque la frayeur dans les rangs des partisans de l’alternance par voie électorale. Et pour cause? Cet évènement pourrait produire un effet contagion vers les autres pays de la Cedeao, où certains caressent le rêve de 3e mandat, et remettre en question l’ordre constitutionnel établi. 

Au pouvoir depuis 2013, le président du Mali a été renversé mardi 18 août 2020 par le Comité national pour le salut du peuple (Cnsp) commandité par des généraux et colonels de l’armée malienne.

Arrêté dans sa résidence à Sébénikoro en compagnie avec son Premier ministre Boubou Cissé et conduits dans le camp de Kati à 15 Km de Bamako d’où est parti le putsch, Ibrahima Boubacar Kéita a annoncé sa démission de ses fonctions de chef d’Etat, la dissolution du parlement et du gouvernement.

La mutinerie du 18 août a lieu dans un contexte de manifestations pour la démission d’IBK depuis juin 2020, menées par le Mouvement du 5 juin et le Rassemblement des forces patriotiques du Mali (M5-RFP) à cause de la guerre et des irrégularités supposées lors des élections législatives de juin 2020. A la suite desquelles des manifestations avaient dégénéré dans la capitale Bamako, les 10 et 11 juillet,  provoquant 23 morts et plus de 150 blessés, selon l’opposition.

Dans une allocution à la télévision malienne, les mutins se disent pacifiques et disposés à remettre le pouvoir aux civils. «La Société civile et les mouvements sociopolitiques sont invités à nous rejoindre pour ensemble créer les meilleures conditions d’une transition pacifique civile conduisant à des élections».

Dans les rues de Bamako, le coup d’État est plutôt bien accueilli. Une foule en liesse est sortie acclamer les militaires. Un couvre feu est instauré à partir du mercredi du 19 août de 21 heures à 5 heures ainsi que la fermeture des frontières avant de les rouvrir, le 21 août.

Face à la position de la Cedeao favorable au retour d’IBK au pouvoir, la coalition d’opposition M5-RPF a mobilisé ses partisans vendredi 21 août en guise de soutien au Cnsp qui a annoncé sa disponibilité à l’élaboration d’une transition qui pourra être civil et ou militaire.

Réactions sordides

Au niveau sous-régional et africain, la mutinerie est mal vue. Dès le 18 août, la Cedeao et par la suite  l’Union africaine, les Etats unis, la France et la Russie ont condamné le coup d’État.

Réunis en visioconférence, les chefs d’État de la Cedeao ont décidé de fermer les frontières avec le Mali ainsi de suspendre leurs échanges financiers avec le pays. Une délégation de l’organisation sous-régionale conduite par l’ex-président nigérian Goodluck Jonathan est arrivée samedi après-midi à Bamako, où elle a été accueillie à sa descente d’avion par des dirigeants de la junte.

Oiseaux de malheur

Ayant pris part à la lutte pour le départ d’IBK,  l’ancien ministre malien Mohamed Aly Bathily a prévenu: «S’ils viennent en oiseaux de malheur, nous leur tirons dans les ailes en plein vol» accusant la Cedeao d’être «un conglomérat de chefs d’Etat, mal dans leurs peaux, qui briment leurs peuples».

L’ancien ministre a annoncé que son pays envisage  de porter plainte contre l’administration de la Cedeao qu’il accuse d’être «responsable du chaos qui est arrivé». «Si elle avait pris ses responsabilités, dit-il, les militaires ne seraient pas intervenus».

La position des chefs d’État de la Cedeao, notamment Alassane Ouattara et Alpha Condé, semble plutôt guidée par la peur de l’effet contagion. Eux dont le projet de 3e mandat est décrié tant en Côte d’ivoire qu’en Guinée avec de risque patent d’instabilité politique.

Pour Alpha Condé, le coup d’État contre son frère IBK est à «condamner de façon très ferme». «Le Président IBK a été élu pour 5 ans et on doit lui permettre de terminer son mandat. Il est extrêmement important qu’à chaque fois qu’on prenne des mesures d’insister sur la coopération. Mais il y a certaines mesures que nous devons prendre afin de contraindre les putschistes non seulement à retourner dans les casernes, mais aussi à respecter l’ordre constitutionnel. Il est extrêmement important que nous montrons notre solidarité à nos frères Maliens, mais que nous exigions aussi que les responsables démocratiquement élus terminent leur mandat dans la paix et la sécurité», a déclaré le président guinéen motivant sa position par le fait que le Mali est confronté au terrorisme mais également à la Covid-19.

Abondant dans le même sens, le président ivoirien Alassane Dramane Ouattara a invité ses pairs à «agir avec détermination afin d’obtenir par tous les moyens, le rétablissement de l’ordre constitutionnel au Mali». Son pays a déjà annoncé la suspension de toutes relations économique et financière, ainsi que tout flux financier en direction du territoire malien, jusqu’à nouvel ordre.

Le président du Sénégal Macky Sall s’est montré plus prudent en s’opposant à l’embargo défendu par le duo Ado-Condé. «Lors du sommet extraordinaire, souligne le président Sall, j’ai appelé la Cedeao à apprécier les sanctions annoncées, pour tenir compte des impératifs humanitaires». «Les denrées de première nécessité, les produits pharmaceutiques et pétroliers ne seront pas concernés par l’embargo », a-t-il écrit sur Twitter.

Le burkinabè, Rock Marc Kaboré a indiqué qu’il est illusoire de penser rétablir le président déchu dans ses fonctions. Il estime que cela serait «diplomatiquement infaisable, militairement aventureux, et politiquement,  c’est une agression contre la souveraineté du peuple malien».

Plutôt que de faire pleuvoir les sanctions sur le Mali, M.Kaboré a proposé d’aider le peuple malien à s’inscrire dans un schéma de sortie de crise pour le rétablissement rapide des institutions, dans l’intérêt de ce pays et de la sous-région.

Face à la position intransigeante de ses homologues Ado et Condé, le président Bissau-guinéen a fait montre d’audace en les rappelant qu’autant  « les putsch» orchestrés par les militaires «révoltés» sont à condamner, autant la Cedeao devrait adopter la même attitude contre «les 3e mandats» qui sont aussi «des coups d’État» car, ils violent la constitution de ces pays et la Charte sur la démocratie et la bonne gouvernance de la Cédéao.

Depuis son indépendance le 22 septembre 1960,  le Mali a connu  quatre coups de force militaires ayant  renversé le pouvoir en place. Le premier contre Modibo Kéita, le 19 novembre 1968 organisé par Moussa Traoré, renversé par Amadou Toumani Touré le 26 mars 1991, et lui-même chassé du pouvoir, le 22 mars 2012 par le capitaine Amadou Sanogo.

Par Le Populaire 

Laisser un commentaire

Votre adresse email ne sera pas publiée.

Ce site Web utilise des cookies pour améliorer votre expérience. Nous supposerons que cela vous convient, mais vous pouvez vous désinscrire si vous le souhaitez. J'accepte Lire la suite

Politique de confidentialité et de cookies
Partager